Arke Sophias <>
Age : 84 Date d'inscription : 02/10/2010
| Sujet: LA VOIE LACTEE - MERCURE Ven 15 Oct 2010 - 17:35 | |
| Aujourd'hui, nous allons parler de la planète la plus proche du soleil : MERCURE Des neuf planètes du système solaire, Mercure est la plus proche du Soleil, et également la plus petite . Sa trajectoire apparente dans le ciel rend son observation depuis la Terre extrêmement difficile : Mercure ne s’écarte jamais de plus de 280° du Soleil et la meilleure résolution télescopique ne dépasse pas 700 kilomètres.
L’essentiel de nos connaissances vient des résultats de la mission américaine Mariner-10. Cette sonde, qui a survolé Mercure à trois reprises, en mars et septembre 1974 et en mars 1975, a permis de préciser considérablement les paramètres physiques et orbitaux de la planète (cf. tableau), paramètres qui n’étaient qu’approximativement connus par les études astronomiques. Ses paramètres orbitaux font de Mercure une planète remarquable dans le système solaire : l’orbite est fortement elliptique – excentricité : 0,206 – et son plan est très incliné par rapport à l’écliptique – 70 (seul Pluton possède une orbite aussi elliptique et aussi inclinée) ; par ailleurs, la période de rotation sidérale de Mercure sur lui-même – 58,646 jours – est exactement égale aux deux tiers de sa période de révolution sidérale autour du Soleil – 87,97 jours. Cette commensurabilité entre rotation et révolution dans le rapport 2/3 est due au freinage de la rotation de Mercure sur lui-même par les marées solaires. Pour un tel freinage, qui normalement aboutit à une synchronisation dans le rapport 1/1, une synchronisation « métastable » dans le rapport 2/3 ne peut être conservée que si l’orbite est fortement elliptique – ce qui est le cas – et si la planète présente une forte anomalie de répartition de masse – ce qui semble donc être le cas. Il est à noter que le plus important cratère d’impact de Mercure, le bassin Caloris, se trouve à proximité de la position théorique de cette anomalie de masse. Mariner-10 a aussi mesuré avec précision la pression au sol (10-12 atmosphère, soit 10-9 hectopascal) ainsi que les températures diurne (4300°C près du périhélie et au voisinage du point subsolaire) et nocturne (env. 1700°C dans les régions équatoriales). La forte densité de Mercure indique que la proportion de fer (par rapport aux silicates) est très importante. Si la planète est différenciée, cela correspond à un noyau ferreux de 1 830 kilomètres de rayon, pour un manteau silicaté ayant seulement 610 kilomètres d’épaisseur. Le magnétomètre de Mariner-10 a détecté un champ magnétique de 400 gammas (400 . 10-9 tesla), vingt fois plus fort que le champ magnétique solaire « régional ». Ce champ mesuré, relativement inattendu, correspond au franchissement par la sonde d’une magnétosphère créée dans un champ dipolaire interne propre à la planète. Le moment magnétique dipolaire intrinsèque est de (4,8 0,5)1012 teslas-mètres cubes, soit 0,04 p. 100 du moment terrestre. Ce champ provient très vraisemblablement du fonctionnement d’une dynamo interne dans le noyau, indiquant par là même que la planète est très probablement différenciée. Aucune autre donnée géophysique ou orbitographique n’apporte de précision supplémentaire sur la structure interne. Les principaux renseignements géologiques concernant Mercure ont été acquis par les caméras de télévision de Mariner-10. Celles-ci ont fourni une couverture photographique de 40 p. 100 de la surface de la planète (entre les longitudes + 100 et + 1900), avec une résolution moyenne de 2 kilomètres ; ponctuellement, la résolution a atteint 200 mètres. 20 p. 100 de la surface ont été photographiés avec un recouvrement stéréoscopique.
1. Morphologie générale Quelle que soit la résolution des images, l’élément morphologique dominant mis en évidence par la mission Mariner-10 est le cratère. Il en existe de toutes tailles : le plus grand, le bassin Caloris, a un diamètre de 1 300 kilomètres ; sur les photographies à très haute résolution, on distingue une multitude de cratères d’un diamètre voisin de 200 mètres ; des mesures indirectes, comme celle de la polarisation de la lumière réémise par Mercure, montrent que le sol est criblé de cratères dont le diamètre descend jusqu’à 1 micromètre. L’étude morphologique des cratères révèle, malgré la variabilité des formes, une grande unité. Au-dessous de 10 kilomètres de diamètre, les cratères ont l’aspect caractéristique des trous d’obus : en forme de bol d’une profondeur comprise entre le cinquième et le dixième du diamètre, ils sont entourés d’une couronne de débris nommés éjecta. Entre 10 et 20 kilomètres de diamètre, les cratères quittent progressivement cette forme pour adopter un fond plus ou moins plat. À partir de 20 kilomètres de diamètre, ils ont tous un fond plat avec, au centre, l’ébauche d’un piton. Entre 20 et 150 kilomètres de diamètre, la couronne d’éjecta se développe et le piton devient de plus en plus net et important. Dans les cratères de 150 à 200 kilomètres de diamètre, il s’élargit et tend à devenir un anneau. Au-delà de 200 kilomètres de diamètre, les cratères, nommés alors bassins, présentent un ou plusieurs anneaux concentriques, sauf quand, postérieurement à leur formation, ils ont été remplis par des matériaux volcaniques. Tous ces caractères (éjecta, variation de forme en fonction du diamètre, etc.) se retrouvent dans les moindres détails sur la Lune et sur une centaine de cratères terrestres pour lesquels des études in situ (qui permettent par exemple de retrouver des fragments de météorite) ont prouvé qu’il s’agissait de cratères d’impact. Le passage de la forme simple (bol) à une forme plus complexe s’explique par des phénomènes de rebond immédiatement après l’impact. Les seules différences entre les cratères de Mercure et ceux des autres planètes ou satellites (répartition des éjecta et des cratères secondaires, diamètres limites de changement de classe...) proviennent des variations de l’accélération de la pesanteur à la surface de ces corps.
Chronologie Sur Mercure, un cratère n’est soumis à aucune forme d’érosion classique (éolienne, fluviatile, etc.) puisqu’il y a absence totale d’atmosphère et d’eau. Il ne peut qu’être recouvert par des terrains plus récents, ou oblitéré partiellement par les impacts d’autres météorites, en particulier des innombrables micrométéorites. Cette « éternité » des cratères explique leur abondance (remarquons qu’il tombe sur la Terre autant de météorites que sur Mercure et que l’atmosphère est bien incapable d’arrêter les plus grosses ; cependant, un cratère terrestre sera la proie de l’érosion, pourra être recouvert de sédiments, etc.). Sur toutes les planètes privées d’atmosphère, on peut établir une chronologie des cratères selon leur état de « fraîcheur ». Les cratères récents sont intacts, alors que les cratères très anciens ont été dégradés par d’autres impacts. Sur Mercure comme sur la Lune, une estimation du nombre de cratères en fonction de leur âge relatif montre que les impacts ont vu leur fréquence diminuer considérablement au cours du temps : les chutes de météorites, très rares aujourd’hui, furent autrefois très abondantes. Les cratères permettent de dater les terrains de Mercure : les terrains anciens, exposés depuis longtemps au bombardement, seront très cratérisés ; en revanche, les terrains jeunes seront peu cratérisés. Les densités de cratères (nombre de cratères par million de kilomètres carrés, par exemple) ont donc valeur de « fossiles stratigraphiques » et permettent d’établir une chronologie relative. En appliquant cette méthode, on peut bâtir une « stratigraphie » et on trouve ainsi que 80 p. 100 de la surface de Mercure sont constitués de terrains très anciens : ce sont les plaines dites intercratères et les terrains dits très cratérisés. 10 p. 100 de la surface sont formés de plaines moyennement cratérisées, dites intermédiaires, qui oscillent d’un pôle relativement abondant (7 p. 100) et encore relativement cratérisé, à un pôle très peu abondant (3 p. 100) et assez peu cratérisé. Le reste de la planète est constitué de plaines lisses, très peu cratérisées, donc « jeunes ». En comparant les dénombrements de cratères avec ceux qui ont été effectués sur la Lune, où l’on connaît les âges absolus des terrains (mesurés par des méthodes de datation isotopique), on peut estimer à 3,8-3,9 milliards d’années l’âge des plaines jeunes, et à au moins 4,0-4,2 milliards d’années celui des plaines intercratères. Mais, contrairement aux continents lunaires, les plaines intercratères ne sont pas « saturées » en cratères, à l’exception d’un faible pourcentage de leur surface (les terrains très cratérisés). Par conséquent, ces vieux terrains de Mercure ne constituent pas une croûte primitive ayant enregistré le bombardement depuis l’origine : un (ou des) processus géologique(s) a (ont) formé de nouvelles surfaces recouvrant cette éventuelle croûte primitive. En classant les cratères selon leur état de dégradation et en distinguant qualitativement plusieurs densités de cratères, on peut obtenir une échelle « stratigraphique » plus fine. Une cartographie d’ensemble de la planète (fig. 1) permet alors d’estimer les surfaces relatives de ces différentes unités, donc de connaître l’évolution avec le temps du ou des processus ayant créé ces terrains. Une telle étude montre que la formation des plaines a été très précoce dans l’histoire de Mercure. Très actif avant 4,1 milliards d’années, ce processus a rapidement décru pour cesser presque complètement il y a 3,9 milliards d’années environ. Une intense mais brève réactivation eut lieu vers 3,8 milliards d’années. Depuis lors, il ne semble plus y avoir eu de production notable de nouveaux terrains sur Mercure.
Nature des terrains La nature chimique et pétrographique des terrains de Mercure n’est pas complètement élucidée, mais deux types d’arguments différents indiquent que la surface est très probablement volcanique.
Arguments morphologiques Si, contrairement à ce que l’on observe sur Mars ou sur la Lune, la présence de volcans stricto sensu n’est pas manifeste, de nombreuses structures (rides, dômes, etc.) sont très probablement d’origine volcanique. De plus, les photographies détaillées des contacts entre plaines lisses et plaines intercratères montrent que les premières recouvrent les secondes, envahissant les parties basses et transformant en « îles » les parties hautes, comme le font des nappes de laves recouvrant un terrain accidenté.
Arguments spectroscopiques Le spectre de réflexion de Mercure contient des bandes spectrales caractéristiques de certains minéraux volcaniques. En particulier, la bande des 950 nanomètres que l’on observe sur Mercure caractérise l’ion fer dans les pyroxènes. Des études spectrales plus précises ont été menées en comparant les spectres de Mercure et ceux d’échantillons lunaires. Ces comparaisons montrent des similitudes importantes entre les spectres de Mercure et ceux des basaltes lunaires pauvres en fer et en titane, les plus clairs des échantillons de basaltes lunaires récoltés lors des missions Apollo 12 et 15. De plus, on peut noter l’absence de raies caractéristiques du fer dans les olivines, raies qui devraient être présentes si Mercure avait une composition chondritique (ultrabasique). Ces études spectrales, ainsi que celles qui concernent l’albédo, montrent que la surface de Mercure est remarquablement homogène. Il n’y a pas comme sur la Lune dualité entre terrains sombres (les mers lunaires, basaltiques) et terrains clairs (les continents lunaires, anorthosiques). La surface de Mercure semble donc constituée en totalité de terrains volcaniques très anciens et complètement disloqués par les impacts pour les plaines intercratères et intermédiaires, un intense mais court épisode volcanique ayant ultérieurement produit les plaines lisses, qui n’ont été que peu modifiées, du fait de la raréfaction des impacts. Cette omniprésence de terrains volcaniques, l’absence de terrains de nature chondritique et la présence d’un champ magnétique indiquent que la planète est très vraisemblablement différenciée.
2. Le bassin Caloris
Morphologie et stratigraphie Le bassin Caloris, la plus grande formation d’impact sur Mercure, d’un diamètre de 1 300 kilomètres, est le trait morphologique dominant de la planète. On n’en connaît pourtant que la moitié orientale, l’autre moitié étant plongée dans la nuit lors des passages de Mariner-10. Son rempart de montagnes et sa couronne d’éjecta lui donnent la morphologie typique des grands bassins d’impact, mais ses structures intérieures éventuelles (anneaux concentriques) sont totalement masquées par les plaines lisses qui le remplissent complètement. Ces mêmes plaines lisses recouvrent d’ailleurs partiellement les éjecta et forment une vaste couronne autour du bassin. Une comparaison du nombre de cratères entre ces plaines et les éjecta de Caloris indique qu’elles sont quasi contemporaines de l’impact (ou à peine postérieures à celui-ci). De plus, il faut noter que 80 p. 100 des plaines lisses de Mercure sont situées à l’intérieur du bassin ou bien sur et autour de ses éjecta, et forment un affleurement relativement continu. Les plaines lisses éloignées de Caloris (et qui n’en représentent que 20 p. 100) sont en revanche très dispersées et constituent de petits affleurements remplissant des dépressions locales. Il semble donc y avoir une relation géographique et chronologique, donc probablement génétique, entre la brève recrudescence du volcanisme ayant donné naissance aux plaines lisses et le gigantesque impact qui a formé le bassin Caloris. La situation est très différente sur la Lune, où le maximum de la surface visible des mers lunaires a été émis 400 millions d’années après les plus grands impacts. L’origine de ce volcanisme mercurien est à rechercher dans les phénomènes de décompression ayant suivi l’impact. La cavité transitoire de Caloris devait avoir à peu près 130 kilomètres de profondeur, ce qui a mis le manteau à nu. Juste après l’impact, les mouvements de réajustement qui ont comblé la cavité ont fait remonter le fond du bassin jusqu’à ce que ce dernier rejoigne à peu près le « géoïde » de Mercure. Cette mise à nu et cette remontée de 130 kilomètres correspondent à une diminution de pression de 1 500 mégapascals environ (15 kbar). Cette décompression, à laquelle on peut ajouter la « faible » énergie cinétique apportée par l’impact, est probablement à l’origine de la fusion partielle du manteau ayant entraîné la brève recrudescence du magmatisme. Un tel magmatisme contemporain de l’impact a peut-être existé sur la Lune, mais il a été recouvert ultérieurement par la majorité du basalte des mers, dont l’origine doit être recherchée dans une fusion du manteau par la chaleur dégagée par des désintégrations radioactives.
Tectonique Le bassin Caloris a été le théâtre d’événements tectoniques importants. Les éjecta périphériques sont affectés de dislocations et forment maintenant des « touches de piano » plus ou moins parallèles. Une telle tectonique n’existe pas (avec cet ampleur, du moins) autour des bassins lunaires. La résolution des images ne permet pas de connaître la nature de ces dislocations (failles normales ou inverses), qui ne sont cependant pas disposées au hasard. Une majorité est approximativement radiale ou concentrique au bassin, ce qui indique bien leur lien avec ce dernier. Mais leur répartition azimutale n’est absolument pas aléatoire, comme le seraient des fractures créées par un impact sur une cible isotrope. Cette fracturation présente quatre directions privilégiées : nord 200, nord 450, nord 1350 et nord 1600. Cette disposition est probablement due au rejeu préférentiel d’anciennes discontinuités, et met donc en évidence une préfracturation régionale antérieure à l’impact. De plus, la plaine intérieure n’a de lisse que le nom. Sa bordure est parcourue de rides grossièrement concentriques, qui semblent être des plis créés par une compression radiale. De telles rides concentriques sont connues dans les bassins lunaires remplis de basalte, mais leur localisation sur la Lune est différente de celle qui existe sur Mercure : sur notre satellite, elles sont réparties dans l’ensemble de chaque bassin – et non uniquement à leur périphérie interne, comme sur Mercure – et elles sont interprétées comme le résultat de la subsidence du bassin sous le poids du basalte, la flexion entraînant dans le bassin une compression d’« intrados ». Cette flexion de l’intérieur du bassin est compensée par un bombement externe qui se manifeste par un système de grabens concentriques extérieurs au bassin. Sur Mercure, la situation est plus complexe. En effet, les rides sont cantonnées à la périphérie de la plaine interne et l’extérieur du bassin ne montre pas de grabens concentriques. En revanche, la partie centrale du bassin possède des fractures extensives, en majorité radiales et concentriques. À la limite des deux domaines internes (central extensif et périphérique compressif), ce sont toujours les fractures extensives qui recoupent les rides, ce qui semble indiquer que l’extension est plus jeune que la compression. En tout état de cause, la tectonique du bassin Caloris, tant interne qu’externe, n’obéit pas à un simple mouvement de flexion isostatique, comme sur la Lune.
3. Tectonique globale
La grille planétaire Il existe sur Mercure de nombreux « linéaments », c’est-à-dire des éléments morphologiques rectilignes : vallées, rides, escarpements, sillons, chaînes de cratères, parties rectilignes de piton central ou de lèvre dans certains cratères, etc. Ces éléments rectilignes sont d’origines très variées (et souvent mal comprises à cause de la mauvaise résolution des photographies) ; localement, leur disposition ne montre pas de cohérence manifeste. En revanche, la cartographie de ces linéaments (toutes morphologies confondues) pour de vastes surfaces montre une répartition azimutale relativement ordonnée : bien que d’origines variées, les linéaments semblent avoir réutilisé des accidents tectoniques préexistants qui avaient une répartition azimutale non aléatoire sur ces vastes surfaces. De plus, ces directions privilégiées sont observées sur presque toute la planète. On retrouve notamment les directions nord 200, nord 450, nord 1350 et nord 1600 dans toute la zone équatoriale. Cette constance en direction d’un ancien réseau de fractures (ayant ensuite rejoué de diverses façons au cours des temps) a été découverte pour la première fois sur la Lune ; ce réseau a été appelé « grille ». L’origine vraisemblable de telles grilles est à rechercher dans les changements d’ellipticité d’une planète lors de variations de sa vitesse de rotation sur elle-même, ou lors de sa réorientation globale causée par une forte anomalie de masse. De telles variations de vitesse et de forme engendrent des grilles présentant une symétrie par rapport à l’axe nord-sud, ce qui est le cas de la grille mercurienne en zone équatoriale. Le début de la formation de cette grille a été très précoce, antérieur à l’impact qui a formé le bassin Caloris, puisqu’elle a été réutilisée par les dislocations périphériques de ce bassin.
Les figures compressives
Observations Une des originalités géologiques de Mercure est constituée par de longues falaises appelées escarpements lobés ou arqués. Ces falaises, de 500 à 3 000 mètres de hauteur et de 50 à 500 kilomètres de longueur, sont présentes sur toute la surface de la planète, surtout sur les plaines intercratères mais également parfois sur les plaines lisses. Elles traversent souvent des cratères et, dans deux cas, modifient leurs dimensions de façon décelable malgré la faible résolution des photographies : le diamètre du cratère mesuré perpendiculairement à la falaise peut être inférieur de 15 kilomètres au diamètre mesuré parallèlement à la falaise. Ce phénomène de raccourcissement et la morphologie des falaises conduisent à interpréter les escarpements lobés comme des failles compressives et des chevauchements. On ne connaît pas de figures extensives datant de la même époque. Ces structures seraient la conséquence d’une diminution du rayon de la planète due à son refroidissement, à cause, en particulier, de son très important noyau de fer. La diminution de la superficie de l’ensemble de Mercure a été estimée en mesurant le raccourcissement moyen de chaque accident et en le multipliant par la longueur totale de tous les escarpements. Elle correspond à une diminution du rayon de 2 kilomètres, c’est-à-dire légèrement inférieure à 0,2 p. 100. Cette contraction liée au refroidissement de la planète est tout à fait compatible avec le très net ralentissement du volcanisme observé. La disposition des escarpements lobés est assez remarquable car elle correspond à peu près à celle des structures compressives orientées radialement au bassin Caloris. La formation de ces escarpements lobés ne peut donc pas être due uniquement à une contraction isotrope de la planète, mais semble avoir été, d’une façon ou d’une autre, influencée par le bassin Caloris. Sur la Lune, un dispositif qui n’est pas sans similitude avec celui de Mercure a été remarqué en 1976. En effet, les grabens lunaires (que l’on retrouve aussi bien tout autour des mers que sur les continents) sont majoritairement orientés radialement au bassin Imbrium, le plus grand bassin d’impact lunaire, d’un diamètre de 1 100 kilomètres (avec également un maximum secondaire de grabens orientés concentriquement au bassin). Cet « effet Imbrium » sur l’orientation des grabens se retrouve sur plus de la moitié de la Lune. Il semble donc que les grands impacts aient un effet tectonique à longue distance sur certaines planètes.
Interprétation On émet l’hypothèse qu’une planète est constituée d’une lithosphère unique et continue, dans un état de contrainte (compressive ou extensive) dû aux variations de volume d’origine thermique (refroidissement ou réchauffement). Un impact qui forme un cratère dont la profondeur transitoire est importante (de l’ordre de grandeur de l’épaisseur de la lithosphère) va percer ou pour le moins fracturer et réchauffer cette lithosphère sur toute son épaisseur. Juste après l’impact, le plancher du bassin se comporte donc comme une région sans résistance mécanique, environnée d’une lithosphère sous contrainte et, de plus, localement surchargée par les éjecta issus du bassin. C’est au voisinage de ces deux régions possédant chacune deux états de contraintes et deux résistances mécaniques différents que se produiront des mouvements relatifs. On peut modéliser cet effet en géométrie sphérique, en utilisant des modèles de coque mince et de contrainte de membrane, en estimant la précontrainte lithosphérique grâce aux modèles « usuels » de l’état thermique de chaque planète, et en déduisant la répartition des éjecta des expériences (et des observations) de cratérisation. L’application de ce modèle à Mercure montre que, juste après l’impact, la lithosphère sous contrainte a convergé vers le centre du bassin et s’est en quelque sorte refermée (fig. 2). Ces mouvements lithosphériques ont entraîné un raccourcissement tangentiel au bassin sur plus des deux tiers de la planète ; ils sont à l’origine de l’orientation partielle des structures compressives (les escarpements lobés). Plus importants près du bassin, ils en ont disloqué les bordures (formant les dislocations en touches de piano). Enfin, ces mouvements ont entraîné une diminution du rayon du bassin que l’on peut évaluer à 2 kilomètres. C’est cette réduction du rayon du bassin Caloris qui a induit la tectonique interne au bassin. Dans un premier temps, lorsque le fond du bassin n’était pas trop rigide, le mouvement centripète des remparts du bassin a « plissé » le plancher interne situé à ses pieds, formant ainsi les rides. La rigidité du plancher augmentant à cause de son refroidissement, le mouvement centripète est devenu incapable de créer des plis à faible rayon de courbure, mais a flexuré la partie centrale du plancher, ce qui a créé les fractures d’extrados visibles au centre du bassin. Les mouvements se sont arrêtés lorsque le plancher a acquis une résistance égale à celle du reste de la lithosphère. Le bassin Caloris représente donc un exemple typique de l’action tectonique à longue distance d’un impact dont le diamètre n’est pas négligeable par rapport à celui de la planète. La situation est relativement identique sur la Lune, où une lithosphère sous précontrainte extensive (Lune en réchauffement) s’est ouverte comme une fleur à la suite de l’impact d’Imbrium. Tel que nous l’a révélé Mariner-10, Mercure est une planète dont l’évolution géologique est ancienne et relativement simple. Sa formation, il y a 4,5 milliards d’années environ, fut suivie d’un bombardement météoritique et d’un volcanisme intenses. Ensuite, alors que le bombardement diminuait considérablement, la planète se refroidit, se contracta lentement, et son volcanisme cessa presque complètement. Pendant cette époque, les effets de marée entraînèrent le ralentissement progressif de sa vitesse de rotation, ce qui créa un réseau de fractures présent sur toute la surface. Vers 3,8 milliards d’années, un gigantesque impact, celui du bassin Caloris, réactiva momentanément l’activité géologique de Mercure, engendrant une brève recrudescence du volcanisme et orientant la compression. Depuis cet événement, la surface de Mercure n’a plus évolué. Quelques rares impacts ont encore troublé l’immobilité de cette planète apparemment morte. Aujourd’hui, seul le champ magnétique témoigne d’une activité interne, dans le noyau. Mais il ne faut pas oublier que ces conclusions ont été tirées de photographies dont la résolution moyenne est de 2 kilomètres et qui ne couvrent que 40 p. 100 de la planète. Si Mariner-10 avait survolé Mercure trois semaines plus tôt, le bassin Caloris, entièrement caché dans la nuit, ne serait pas connu, et les conclusions que l’on tirerait sur Mercure seraient très différentes de celles qui ont été proposées. Il faut noter toutefois que les observations radars de Mercure depuis la Terre montrent que la face non connue ne semble pas contenir de bassin de dimension comparable au bassin Caloris, et possède une signature radar comparable à celle de la face connue (des observations radars menées en 1991 et en 1992 ont cependant révélé, au voisinage des pôles, deux zones très réfléchissantes, que certains chercheurs ont expliquées par la présence de glace d’eau dans des fonds de cratères perpétuellement dans l’ombre ; cette interprétation demeure contoversée). Il est regrettable que Mercure soit l’unique planète proche à n’avoir été survolée que par une seule sonde. Mercure | |
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