Résumé: Italie 1944. Le petit village de salo. De jeunes adolescents sont kidnappés et emmenés dans une villa isolée. Huit garçons et huit filles seront choisis et soumis aux désirs et à la dépravation de quatre hauts dignitaires tandis que quatre duègnes maquerelles conteront leurs plus abominables récits sexuels. Au bout de 120 jours arrivera le temps des châtiments...
Dés le début de sa carrière, Pasolini allait signer toute une série d'oeuvres allant à l'encontre des valeurs morales et religieuses. Mais plus qu'un agitateur des bonnes consciences Pasolini est avant tout un poète, un poète maudit mais un poète tout de même. Il a toujours su jouer avec les futilités pour mieux se focaliser sur le mystère en exorcisant par la même occasion ses propres démons. A ses fins, il a souvent eu voire pratiquement eu recours à la complaisance parfois facile où le sexe est omni-présent.
En annonçant en 1975 la réalisation de Salo, tiré de l'oeuvre de Sade, Pasolini allait cette fois retourner la tendance. La sublimation de l'amour, du sexe allait trouver son antithèse, bouleversant toutes les valeurs morales et sociales.
Transposant le roman du Divin Marquis dans l'Italie fasciste de la deuxième guerre, Salo est une véritable démonstration de ce que l'homme peut engendrer comme horreur.
Sans rien changer à l'oeuvre originelle si ce n'est pas le nom et l'âge des enfants, plus agés dans le film que dans le roman pour d'évidentes raisons, Salo est une sorte de catalogue d'atrocités, une métaphore sadique du nazisme-fascisme et de ses crimes contre l'humanité.
Il est évident que les quatres dignitaires, le Duc, l'Evêque, le Président et son Excellence, sont des SS en civils et les narratrices des maquerelles perverses.
Ils sont la représentation de ce qu'on peut faire lorsqu'on détient le Pouvoir, une vision cauchemardesque de ce que la puissance peut engendrer. L'homme, le peuple n'est plus qu'un simple jouet qu'on va déshumaniser, animaliser annihilant tout rapport humain pour amener à la destruction.
Le corps devient une marchandise grossière, le sexe une forme de possession par d'autres personnes, une aberration physique et morale de l'âme humaine. Salo est une vision de ce qu'est la laideur humaine, une démonstration brutale et paroxysmique de la violence primitive des forts contre les faibles. Jamais film n'aura montrer avec tant de force, de cruauté et de complaisance l'ignominie. celle ci est d'autant plus perverse qu'elle se fond dans une sorte de bienséance, se tapit dans une forme d'élégance, se cache dans cette apparence derrière laquelle les nazis aimaient se dissimuler. En ce sens, Salo pourrait être le meilleur film nazi sur le nazisme jamais tourné.
Loin des pires abominations que le cinéma italien imagina, Salo est un film sur le véritable gore, le plus terrible, celui qui est tapi au fond de l'être humain. En ce sens, le film fait mal. Il est un long cauchemar où chaque scène, chaque détail, chaque parole prononcée prodigue un sentiment effroyable de malaise, une terreur viscérale parvenant à vriller le plus profond de notre âme.
Tout espoir est définitivement abandonné, pas même la religion ou quelque autre croyance ne parvient à réconforter les victimes, celle ci étant proscrite. Les victimes sont seules, cette solitude effroyable, qu'on ne peut ressentir qu'une fois face à la mort. La Madone n'est plus qu'un symbole grotesque surplombant un baquet d'excréments auquel sont attachés les condamnés quasi agonisant. Ils sont nus, dépouillés de tout tant de leurs vêtements que de toute dignité.
Salo c'est l'homme face au Néant, rendant le film insupportable, un néant absolu que le réalisateur amène progressivement pour mieux indisposer et amener vers l'horreur. Salo n'est que la lente destruction de l'homme qui de cercle en cercle va passer du stade humain au stade animal jusqu'à son extermination, ce retour au néant originel. Les 120 jours sont une descente aux Enfers, trois mois associés à chaque fois à une nouvelle narratrice, plus cruelle que la précédente et censée représentée la nature humaine, progression inéluctable vers une horreur de plus en plus grande.
En parlant d'enfer, le mot trouve justement toute sa force et sa justification lorsque Pasolini fait descendre ses narratrices d'un long escalier plongé dans une inquiètante obscurité. Pasolini se rapproche ici de la vision de l'Enfer de Dante. ses narratrices semblent en effet sortir des entrailles de la Terre.
L'acte sexuel est un plaisir triste et particulièrement sale. On en ressort honteux, en larmes, souillé, comme lors de la séquence de masturbation forcée dans le premier cercle. Cette scène comme celle du mariage contraint entre l'Evêque et le jeune homme et de la nuit de noces justifient la trame intrésèque de Salo, celle de l'acte sexuel dans une société libérale répressive qui refuse toute forme marginale de plaisir.
François Chalais disait de lui : aux yeux de certain Pasolini est
l'archange d'une morale nouvelle, pour les autres au contraire pas de doute à avoir c'est un enfer qu'il est entrain de griller, en réalité toute sa vie il a essayé de se mettre en règle avec ses propres contradiction, se vautrant à la fois son cœur et son corps dans la boue, de cette boue même il lui est arriver de faire jaillir des diamants, chez lui l'or et les excréments était indissociable.
Mon tout premier Pasolini découvert dans les films victimes de la censure qui était devenus une routine chez lui. On peut pas dire que j'ai commencer par le plus sage, ni le plus propre. Après sa trilogie de la vie (Décaméron, les contes de Canterbury, les milles et une nuits) exaltant sur la sexualité.
Le cinéaste veut commencer ce qu'il appellera la trilogie de la mort. Pasolini considéra comme la libération sexuelle comme une tromperie. Il s'élève contre la société de consommation et la capitalisme, qui asservissent la sexualité, qui devait être libératrice et exposer la vie privée. Il dénonce une nouvelle fois les horreurs de la société bourgeoise : la sexualité, auparavant vue comme une grâce pour l'humanité, devient une simple marchandise à consommer sans égard pour la dignité humaine.
Construit comme une descente progressive à travers différents cercles de la perversité, à l'image du Marquis de Sade,Salo est un film privée de joie érotique et de vulgarité. Le film est rempli de plans larges qui permettent du coup de les comparer à des tableaux et d'idées de mise en scènes particulièrement incroyables. Pour ceux qui ne connaisse pas Pasolini même si son film ne le parait pas, Salo est très structuré : c'est un univers triptyque qui nous fait basculer d'horreur en horreur, une sorte d’Odyssée dans un univers de sadisme atroces.
C'est sans nul doute le film le plus sombre et le plus désespérer de Pasolini. Le chef d'oeuvre de l'horreur absolue, de l’insupportable et de l'indispensable. En dehors de sa violence exceptionnelle, c'est sa méchanceté bestiale et atrocement civilisé qui pourrait déranger.
Un véritable cauchemars ou chaque scène, chaque détail, chaque parole prononcé prodigue un sentiment effroyable de malaise, une terreur viscérale parvenant à vriller le plus profond de notre âme. Film culte ou on en ressort pas indemnes, à ne pas mettre entre des yeux, des estomacs trop sensibles et innocents.